Dans le cadre de l’exposition “Koungo Fitini”, signée Arnold Grojean, en off des rencontres de Bamako, des ateliers d’expressions artistiques à l’endroit des enfants de la rue et des enfants migrants se sont tenus au musée du district de Bamako. Une restitution de ces ateliers a eu lieu le 9 février dernier, toujours au musée du district.
« C’était l’un de mes amis, on faisait tout ensemble. Mais du fait qu’il a commencé à prendre le joint et les drogues ; il est devenu fou. Ici, c’est le lieu où il vient s’asseoir et dormir… », ce fragment d’une histoire, parmi tant d’autres, racontées par les enfants de la rue sous différents formats est un aperçu de cette réalité décrite par l’exposition Koungo Fitini du photographe Arnold Grojean.
La faim, la maladie, les moustiques, le regard des gens, la prostitution, le vol, le viol, la police, la prison, la rue, les attaques, les gangs, la drogue, les armes, la fatigue, l’énervement, le couteau, les comprimés, les petits boulots pour manger, la consommation de l’alcool, de la colle, le manque d’argent, le lynchage, le rejet familial, la violence, la mendicité, le braquage, la recherche de travail… la vie de ces enfants, n’est pas un fleuve tranquille.
Arnold a travaillé avec des enfants de la rue dans le district de Bamako, entre 2013 et 2015. Dans le cadre du off des Rencontres de Bamako, il a présenté cette exposition qui est une véritable immersion dans le quotidien de ces enfants qui vivent dans la rue et dont l’âge varie entre 12 et 22 ans. « Lors de mon premier voyage, la première partie de ce travail s’est effectuée via une association malienne « Sinjiya-ton Mali » travaillant pour la réhabilitation sociale et professionnelle d’enfants vivant dans la rue. Avec les responsables de l’association nous avons monté des ateliers photographiques visant à ce que les enfants puissent témoigner de leur quotidien au travers de photos, de dessins et de récits », explique le photographe.
C’est suivant cette vision que le CISP, en marge de l’exposition d’Arnold Grojean, a organisé des ateliers d’expressions artistiques en collaboration avec le SamusocialMali et l’Union européenne au jardin du Musée du district de Bamako. Cet atelier à l’endroit des enfants de la rue et des enfants migrants, s’est tenu durant un mois et demi. Une quinzaine d’enfants, deux fois par semaine, ont été invités à visiter les expositions et par la même occasion, traduire par le dessin leur quotidien. Avec le soutien de deux animateurs de SamusocialMali et deux autres personnes à savoir le plasticien Ibrahim Kebe et Loes Kuijpers.
L’objectif recherché derrière ces ateliers était de permettre à ces enfants de regagner confiance en eux, de se redécouvrir en profitant de ces semaines d’apprentissages et de méditations que leur offrent ces ateliers.
Ils sont environ 150 enfants à avoir participé et à avoir produire des dessins, avec le soutien de leur mentor « En tant qu’artiste, et ayant déjà travaillé avec d’autres enfants notamment des enfants sourds muets et des enfants ayant de très bonnes conditions de vie, cette expérience avec les enfants de la rue a eu, je pense, un effet thérapeutique sur certains d’eux », se livre Ibrahim Kébé.
Pas qu’un effet thérapeutique. En effet, suite au fait qu’il ait exprimé ses rêves à travers un dessin, le fait de vouloir être chauffeur, l’un des plus grands parmi eux a été présélectionné pour une formation en conduite auto. Un impact fort qui montre l’importance de multiplier ce type d’atelier pour le grand bonheur de ces enfants. « Je suis ému par l’énergie et la force des nombreux portraits et témoignages. J’ai été touché par la confiance des enfants. Et je suis conforté par la capacité de l’art, des arts à initier un début de changement », témoigne pour sa part Loes Kuijpers.
Issouf Koné
