« La culture, facteur de résilience, de paix et de cohésion sociale », tel était le thème d’un panel, animé le mardi 11 juillet dernier, dans la salle de conférence du gouvernorat de Mopti, dans le cadre de la biennale artistique et culturelle Mopti 2023. Le rôle de la culture dans la prévention et la gestion des conflits était au cœur des échanges.
La biennale artistique et culturelle bat son plein dans la Venise malienne. Cette édition de relance de l’événement prévue du 6 au 16 juillet 2023 ne se limite pas qu’aux prestations artistiques proposées par les différentes troupes des 19 régions du Mali et du district Bamako. La biennale Mopti 2023 propose également des activités intellectuelles, des cadres de réflexion et d’échange sur les différentes problématiques actuelles auxquelles font face le Mali et le monde.
En droite ligne de l’objectif principal de la biennale qui est de faire de la culture un levier de l’unité nationale, de paix, de cohésion sociale, du vivre ensemble et du développement socio-économique et culturel du Mali, un panel autour du thème « La culture, facteur de résilience, de paix et de cohésion » a été aminé par Sidy Camara, secrétaire général du ministère de la réconciliation nationale, de la paix et de la cohésion sociale et Jean-Luc Gbati Sonhaye, conseiller technique chargé de l’appui institutionnel au projet Donko Ni Maaya de la coopérative allemande GIZ .
Les mécanismes traditionnels
Ce panel a permis d’édifier l’assistance sur les différents mécanismes sociaux et culturels de prévention et de gestion de la crise dans la société malienne. Les mécanismes traditionnels ont été abordés par le premier intervenant. M. Camara s’est appesanti sur certaines pratiques sociales et culturelles comme étant des mécanismes de prévention ou de gestion de crises dans notre société.
Parmi ces pratiques, le cousinage à plaisanterie. Cette pratique ancestrale est assez rependue en Afrique de l’ouest. Dans sa forme malienne, elle est utilisée par certains noms de famille ou des ethnies pour se moquer, se railler et se taquiner sans colère, ni frustration, ni rancune. Cette pratique est un outil incontournable de cohésion sociale dans nos sociétés. Elle est l’une des pratiques anciennes qui résistent encore aux vents de la modernité.
Les relations entre petits enfants et grands-parents est une pratique un peu plus familiale même si elle quitte souvent ce cadre familial et s’opère entre de véritables inconnus dans la rue. Elle cultive la bonne humeur entre ses pratiquants. Le rôle des légitimités traditionnelles qui sont écoutées ainsi que les liens entres les jeunes de catégories d’âge ont également été évoqués par M. Camara selon qui, dans notre société, les jeunes de différentes catégories d’âge tissent des liens très forts et restent généralement solidaires entre eux. L’affection et les liens d’amitié sont efficaces dans la prévention des crises.
Alternatives aux positions extrémistes
Le dialogue est également l’un des mécanismes de prévention de crise. Il permet l’échange et la compréhension entre les populations. L’exemple du Toguna chez les dogon a été cité à titre illustratif. Le rôle de la femme n’est pas négligeable également dans la prévention des conflits. « On dit que la nuit porte conseil car les hommes consultent leurs épouses pendant la nuit afin d’être mieux orientés dans la prise des décisions importantes pour la société. Les femmes sont de bonnes conseillères dans notre société », explique M. Camara.
De son côté, Jean-Luc Gbati Sonhaye est revenu sur l’engagement du Projet Donko Ni Maaya de la coopérative allemande GIZ dans la prévention et la gestion de crise. Ce projet s’appuie notamment sur les expressions artistiques culturelles qui constituent aujourd’hui de véritables véhicules de messages de paix et de cohésion sociale. Pour ce faire, le Projet passe par les artistes et acteurs culturels en soutenant leurs initiatives.
A en croire M. Sonhaye, le projet de la GIZ offre aux jeunes des alternatives aux positions extrémistes à travers des activités culturelles. « Les possibilités d’expression par des moyens artistiques font des jeunes des porte-paroles dans de nombreux cas. Par le transfert de connaissances artistiques sur des sujets parfois sensibles et tabous, ils permettent la création de nouveaux niveaux de compréhension », explique-t-elle.
Au-delà de l’aspect sensibilisation par des créations artistiques et culturelles, la GIZ à travers le projet Donko Ni Maaya œuvre également pour la création d’opportunités de carrière en réponse aux faibles taux de formation professionnelle des jeunes, le développement de perspectives significatives empêchant de nombreux jeunes de basculer dans l’extrémisme violent en leur offrant notamment des opportunités d’emploi durables et stables.
Youssouf Koné / Issouf Koné, Biennale Mopti 2023