Image Rapou Dogokun

Festi Hip-hop rapou dôgôkun : la fabrique d’artistes engagés

La 5e édition du festival Festi Hip-hip rapou dôgokun, qui a débuté le 6 mars dernier et s’étend jusqu’au 12 mars 2023, bat son plein dans la capitale malienne. Initié en 2018 par le rappeur Master Soumy et son manager Dony Brasko, ce festival se positionne aujourd’hui comme une fabrique d’artistes conscients et engagés faisant de la revendication sociale et politique leur cheval de bataille.

Festival Festi Hip-hip rapou dôgokun, 5eme édition

Issu de la culture hip-hop née dans le Bronx new-yorkais vers les années 1970, le rap fait son apparition au Mali vers les années 1990. A l’origine et conformément aux caractéristiques intrinsèques de ce genre musical, le rap malien était axé sur les revendications sociales et politiques. Mais ce rap, de ses débuts à nos jours, a connu plusieurs mutations dues aux influences exotiques.

Ainsi, des groupes comme Tapa Pound, les Sofas, Fanga Fing qui font partie de la première vague de précurseurs du rap conscient au Mali ont très peu d’adeptes au sein de la nouvelle génération dont la démarche artistique est beaucoup plus orientée vers l’égotrip et les louanges. Néanmoins quelques-uns ont pu sortir du lot. Les plus remarquables sont Master Soumy, Mylmo dont les textes dépeignent les tares de la société, la mauvaise gouvernance mais surtout traitent de l’actualité politique. Aussi, l’éclatement de la crise malienne en mars 2012 a davantage donné plus de place à des textes invitant à la paix et à la réconciliation nationale.

Festival Festi Hip-hip rapou dôgokun, 5eme édition

Des dérives dans le rap

C’est dans l’optique de préserver cette valeur intrinsèque du rap au Mali que le Festi Hip-hop rapou dôgôkun a vu le jour en 2018 grâce au rappeur Master et Soumy et son manager Dony Brasko. Ce rendez-vous annuel de la culture hip-hop se veut une fabrique d’artistes engagés pour la cause de leurs populations. Plus axé sur la formation, ce festival réunit chaque année une centaine de jeunes rappeurs de Bamako et des régions, afin de leur fournir des outils nécessaires pour la construction de leur carrière.

Aujourd’hui, le rap est le style musical le plus prisé au Mali. C’est une musique qui est très consommée par les jeunes qui constituent 60% de la population malienne. La responsabilité du rappeur qui doit être un messager, un informateur et un sensibilisateur pour tous ces jeunes reste donc engagée. Car son rôle doit primer dans son combat de tous les jours. « Nous avons constaté trop de dérives dans le rap d’aujourd’hui. La plupart des jeunes rappeurs font l’apologie de la délinquance, de l’alcool et de la drogue. L’objectif de ce festival est de les sensibiliser tout en contribuant au changement de leur mentalité. Ces jeunes rappeurs doivent avoir une meilleure influence sur leur entourage », nous confie Dony Brasko.

Festival Festi Hip-hip rapou dôgokun, 5eme édition

C’est pourquoi le Festi hip-hop rapou dôgôkun ne s’arrête pas qu’à l’aspect festif. Le festival mise davantage sur la formation des jeunes. La preuve en est que sur les 7 jours de l’événement, les 5 sont consacrés aux ateliers de formation des jeunes venus de Bamako et des régions du pays… Pour cette édition, ils sont une centaine de bénéficiaires de ces formations qui se sont déroulées autour des modules comme l’écriture, la gestion de carrière, la communication, le rôle de l’artiste en période de conflits ainsi que de partage d’expérience avec des artistes confirmés comme Cheick Tidiane Seck. « Cette formation nous permet de nous professionnaliser. Elle nous apprend à composer des chansons qui peuvent avoir un impact positif sur notre environnement », explique Kalice Boga, l’un des bénéficiaires de cette 5e édition. 

Entre le rap et la kalachnikov  

« Je suis un enfant de Gao, j’ai vécu l’occupation des régions du nord du Mali. J’avais le choix entre une kalachnikov et un stylo. Si j’ai pu choisir le stylo c’est grâce au festival hip-hop qui m’a appris que je dois être un acteur de paix et non de la guerre. Aujourd’hui, je chante la paix et je sensibilise grâce à ma musique », nous confié Youssoufa Diallo, un jeune rappeur de Gao, bénéficiaire de la formation de la 3e édition du festival.

Festival Festi Hip-hip rapou dôgokun, 5eme édition

Le festival se veut également un espace d’émulation entre les jeunes artistes. Après la formation, les jeunes passent à la pratique à travers un concours dénommé 16 mesures pour convaincre. Compétition à l’issue de laquelle les trois meilleurs seront primés. En guise de récompense cette année, le premier du concours sera accompagné pour la production d’un album de 8 titres et d’un clip vidéo. Le 2e, deux titres et un clip vidéo et le 3e, un titre et un clip vidéo. Ils bénéficieront chacun d’une campagne de promotion de leurs œuvres. Le concours se fait cette année autour du thème de l’édition qui est : « Paix et réconciliation nationale, je m’engage et toi ? »

Dans l’optique de toucher plus de jeunes des quartiers populaires, les organisateurs du festival dont les premières éditions se sont tenues dans le quartier de Djalakorodji, ont décidé de le délocaliser cette année à Sénou, un quartier périphérique de la capitale malienne. Une itinérance qui permettra au festival de se déplacer, lors des éditions à venir, dans des villes de l’intérieur du pays.  

Youssouf Koné

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