« La peur percée perçante », du jeune scénographe guinéen, Mohamed Diané, réalisée sur un arbre dans le village du festival Arts Femmes, Deguela, est une œuvre sur les multiples défis auxquels fait face la femme dans notre société.
Parmi la dizaine d’œuvres scénographiques qui jonchent le village du festival Arts Femmes à l’occasion de sa 6e édition, l’une d’entre-elles captive le regard des curieux. Il s’agit de La peur percée perçante,une œuvre atypique du jeune scénographe guinéen Mohamed Diané.
Réalisée sur un arbre à base de tissus aux couleurs diverses, de bambou, de bois et de fils de fer, l’œuvre est un creuset d’interprétations sur la condition féminine dans notre société.
Une œuvre, mille interprétations
La peur percée perçante représente à première vue, un visage de femme : Ses lèvres recouvertes de rouge à lèvres, ses yeux écarquillés, ses boucles d’oreille et un foulard mis en exergue, permettent au visiteur, même le moins averti de pouvoir facilement lire l’œuvre. Cependant, derrière ce visage grave et apeuré se cache une pléiade d’interprétations. L’artiste, comme tous les autres, a créé son œuvre en fonction de la thématique retenue pour cette 6e édition du festival Femmes, cohésion sociale et sécurité. L’idée du thème est quelque peu tranchée dès la première vue de l’œuvre : les yeux écarquillés de la femme renvoient à sa peur en cette période d’insécurité où les femmes et les enfants sont les plus exposés et les plus vulnérables. Ceux qui ressentent le plus les effets des crises que traverse le monde. Et la femme a toujours occupé une place importante dans notre société tant traditionnelle que moderne. Ce qui fait que son rôle est capital dans la consolidation de la paix et la cohésion sociale.
Les yeux grandement ouverts sont un signe de peur chez l’être humain. Dans ce cas précis, la femme est assaillie par la peur que peut lui renvoyer tout trouble sécuritaire et sociopolitique auxquels sont confrontés et le Mali et le reste du monde. C’est aussi la peur que lui renvoie son environnement, foyer de violence et d’assujettissement. Ces yeux peuvent aussi être un appel à l’observation, à la vigilance, à avoir un regard sur le monde et d’y trouver sa place. Un monde dominé par les hommes. Les hommes n’ont pas le monopole du pouvoir dans la société. La femme doit elle aussi avoir son mot à dire.
Un appel à s’affranchir du patriarcat
Le choix de l’arbre pour cette création n’est pas fortuit. D’abord, il est pratiquement le plus grand et le plus touffu des arbres qui parsèment le site du festival. « La femme a beau être marginalisée dans notre société, elle reste le centre du monde et de la vie car elle la donne et l’entretient. La nature lui a accordé ce pouvoir », confie l’artiste.
La scénographie, comme tout art est un moyen d’expression et Mohamed Diané, grâce à son talent et sa créativité, a su extérioriser ses préoccupations à travers cette œuvre qui rappelle non seulement la place de la femme dans la société mais l’invite également à sortir de sa zone de confort et à s’affranchir du patriarcat pour son épanouissement.
Agé de 26 ans, Mohamed Diané est diplômé de l’Institut supérieur des arts Mory Kanté de Guinée (ISAMKG) où il a obtenu une licence en Interprétation en arts dramatiques. Mais, c’est ailleurs qu’il trouve sa passion : la scénographie. Il décide donc d’apprendre et de se perfectionner dans cet art. C’est cette envie qui le conduit au Mali à la 6e édition du festival Arts Femmes, où il est scénographe stagiaire.
Youssouf Koné