Les efforts pour la préservation et la valorisation des manuscrits anciens du Mali se poursuivent. Une session de sensibilisation à l’endroit des décideurs s’est tenue au siège du Conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC) afin de poursuivre le plaidoyer auprès des décideurs dans le cadre du projet « valorisation et promotion des manuscrits anciens au Mali ».
Qu’ils soient de l’Agence nationale de Communication pour le développement ; de la Direction national du Patrimoine culturel ; de l’UNESCO au Mali ; Conseillers de la République membres du Bureau du Conseil économique, social, environnemental et culturel ; membres de l’ONG SAVAMA-DCI ; de l’Institut des Hautes études et de Recherches islamiques Ahmed Baba de Tombouctou ; les acteurs, armés de détermination, sont sur plusieurs fronts, dans l’optique d’interpeller les décideurs mais aussi les Maliens, les Africains de façon générale sur l’urgence vis-à-vis de ce patrimoine national, peu exploité, peu mis en avant et pourtant si capital pour comprendre le passé, le présent afin de déterminer l’avenir.
En effet, les manuscrits anciens, de par leur diversité et leur richesse, témoignent d’une civilisation ancienne. Ils sont la preuve de tout ce que l’Afrique a opéré en terme de recherche scientifique, littéraire, économique, astronomique, religieux, politique et autres. Ces documents contiennent des informations qui servent encore de repère aux chercheurs contemporains.
Ecrit en Arabe et en Ajami (Peul, Songhaï, Tamasheq, Bambara, Soninké…), les manuscrits anciens sont également le symbole d’une diversité culturelle non négligeable. « Que le Mali prenne conscience du devoir continental qu’il détient parce que ces manuscrits sont un témoignage pour chaque enfant africain de comprendre que l’Afrique à contribuer dans le développement de civilisation à travers le monde et que ces manuscrits le prouvent, l’attestent, » a déclaré M. Edmond Mounkala, représentant pays de l’Unesco au Mali.
La situation des manuscrits
Si la ville de Tombouctou, fondée vers la fin du XIe siècle est considérée comme un lieu important de préservation des manuscrits anciens, notamment à travers l’Institut des Hautes études et de Recherches islamique Ahmed Baba, il est important de noter qu’il n’est pas l’endroit unique au Mali où l’on les retrouve. Les manuscrits sont répandus un peu partout sur le territoire, de Bamako à Kayes en passant par Sikasso, Ségou ou encore Mopti. On en trouve à foison dans les collections familiales, détenus par des anciens qu’ils soient des légitimités traditionnelles ou de simple chef de famille. On estime très exactement à 20 306 le nombre de manuscrits qu’on retrouve directement chez des familles.
Pour ce qui est de la situation générale actuelle de ces manuscrits, selon des chiffres avancés par l’ONG SAVAMA-DCI, 33 localités, parmi lesquelles 18 à travers 8 régions, sont identifiées. 511 032 manuscrits anciens ont été localisés, mais sont dans une extrême fragilité en raison de l’état mitigé de leurs conditions de conservation. Les manuscrits anciens qui se trouvent dans des bibliothèques ou centres localisés à Ségou, Tombouctou, Djenné, Mopti, Gao, Ansongo, Taoudéni, Boujbeha et Kayes sont au nombre estimatif de 490 726, observe l’ONG SAVAMA-DCI. « Les manuscrits du Mali demeure une valeur inestimable qu’il faudra préserver, conserver, exploiter, sauvegarder et promouvoir pour l’avenir de notre pays », a témoignéYacouba Katilé, président du Conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC).
Sensibiliser, encore et encore
Sensibiliser, encore et encore sur la nécessité de faire de la protection des manuscrits anciens une priorité, tel est le mot d’ordre de l’Agence national de Communication pour le développement (ACND). Le mercredi 17 janvier 2024 dernier, le Conseil économique, social, environnemental et culturel a été le théâtre d’une rencontre visant à accroitre la communication sur le sujet à travers le projet « valorisation et promotion des manuscrits anciens au Mali », inclus dans le vaste programme Mémoire du Monde de l’UNESCO.
Cette rencontre avec les acteurs a permis non seulement de parler de la valeur des manuscrits anciens mais aussi de présenter les structures qui œuvrent pour leur promotion à savoir le Centre de recherche et de documentation Ahmed Baba, devenu en 1999 l’Institut des Hautes études et de Recherches islamiques Ahmed Baba (IHERI-ABT). Avec son volet enseignement, universitaire et post universitaire, ses rôles étant les suivants : la collecte, la conservation, la restauration, l’exploitation et la diffusion des écrits en langue arabe et toute autre langue qui concernent la culture et l’histoire de l’Afrique. Il contribue à la recherche et au développement des cultures africaines, à l’étude et à la diffusion des valeurs culturelles et religieuses ainsi qu’à la formation universitaire.
Avec l’ONG SAVAMA-DCI, l’IHERI-ABT a procède à la prospection des manuscrits afin de déterminer leurs lieux d’existence ; ensemble, ils conservent et restaurent les manuscrits physiques pour une meilleure sauvegarde ; ils procèdent aussi à une conservation numérique afin de disposer de copie alternatives et faciliter l’exploitation ; ils travaillent sur un catalogue des manuscrits afin de mieux les identifier et les valoriser. Surtout, ils travaillent aussi sur la traduction et la publication afin de permettre leur exploitation.
A côté, nous avons l’ONG SAVAMA-DCI devenue une ONG en 2005.
Des actions concrètes
Les deux structures ont plusieurs réalisations à leur actif, preuve de leur engagement pour les manuscrits anciens. En termes de publication des résultats de recherches, 21 ouvrages (dont 9 au compte de l’IHERI-ABT et 12 pour SAVAMA-DCI). On note aussi la publication de 11 numéros de la Revue Sankoré au compte de l’IHERI-ABT, la publication de 15 volumes de catalogues de manuscrits anciens dont 10 pour la SAVAMA-DCI et 5 pour l’IHERI-ABT, la formation continue des techniciens dans le domaine de sauvegarde et de conservation des manuscrits anciens ; la construction des bibliothèques de manuscrits anciens et la Conservation physique et numérique des manuscrits anciens.
M. Abdel Kader Haidara, président de l’ONG SAVAMA-DCI s’est dit très satisfait de cette rencontre tout comme M. Mohamed Diagayété, Directeur général de l’IHERI-ABT. « Chaque Malien doit s’approprier ces manuscrits » a déclaré ce dernier pour terminer.
Issouf Koné