Le bureau de l’UNESCO au Mali, a organisé les 12 et 13 octobre 2022, à Tombouctou, un atelier de formation qui a permis de renforcer les capacités d’une soixantaine de maçons traditionnels et autres acteurs de la chaine de valeur de la gestion des bâtiments protégés de la ville des 333 saints, en maitrise des outils et méthodes de conservation du patrimoine architectural.
En 2012, suite à l’occupation des régions du nord du Mali, le patrimoine culturel, les pratiques et les expressions culturelles desdites régions ont été endommagés. Cependant, la ville de Tombouctou a été celle qui a connu le plus de préjudices de la part des groupes djihadistes.
Ainsi,ce sont 14 des 16 mausolées de Tombouctou, inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO, ainsi que la porte secrète de la mosquée Sidi Yahia qui avaient été détruits au cours de cette occupation. Ces derniers ont ensuite été inscrits sur la liste du Patrimoine mondial en péril de l’UNESCO en 2012.
Une affaire de justice
Par la suite, le Gouvernement malien a décidé de déférer la situation du Mali à la Cour pénale internationale (CPI) en juillet 2012. Après un procès tenu du 22 au 24 août 2016, le “djihadiste” Ahmad Al Faqi Al Mahdi a été reconnu coupable : « De crime de guerre consistant à avoir dirigé intentionnellement des attaques contre dix (10) bâtiments à caractère religieux et historiques à Tombouctou, au Mali, en juin et juillet 2012. Il a été condamné à neuf ans d’emprisonnement par les juges de la CPI », précise l’UNESCO.
Mais pas que. Car toujours selon l’UNESCO, les juges ont rendu, le 17 août 2017, une Ordonnance de réparation dans laquelle ils ont reconnu « le préjudice subi par la communauté de Tombouctou, la population malienne et la communauté internationale ».
L’Ordonnance de réparation a fixé la responsabilité d’Ahmad Al Faqi Al Mahdi aux fins de réparations à deux millions sept cent mille euros (2,7 millions d’euros) en faveur des victimes des crimes qu’il a commis, et a ordonné la mise en œuvre de réparations individuelles et collectives, notamment sous la forme d’indemnisation, de mesures symboliques, de soutien psychologique, de réhabilitation et d’entretien des bâtiments protégés. C’est ainsi que, le Fonds au profit des victimes (TFV) a été chargé par la CPI de la mise en œuvre du programme de réparations.
Les réparations collectives visent à répondre aux préjudices matériels, économiques, sociaux et psychologiques subis par la communauté de Tombouctou du fait de la destruction par Ahmad Al Faqi de ses dix bâtiments protégés. Ils s’articulent autour de trois axes principaux avec un dispositif de restauration du patrimoine culturel, mis en œuvre par l’UNESCO, un dispositif de commémoration, confié à l’ONG CFOGRAD, un dispositif d’appui économique, confié à l’ONG CIDEAL. Un accompagnement psychosocial est fourni de manière transversale aux trois dispositifs.
Formés aux méthodes de conservation du patrimoine architectural
C’est dans ce cadre que le bureau de l’UNESCO au Mali, en collaboration avec le Ministère de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, à travers la Mission culturelle de Tombouctou, le Fonds au profit des victimes de la CPI et avec l’appui financier du gouvernement allemand, a organisé les 12 et 13 octobre 2022 à l’hôtel Colombe de Tombouctou, un atelier de renforcement des capacités des maçons traditionnels de Tombouctou sur les enjeux de la conservation du patrimoine culturel bâti dans un contexte de réparation. « Cet atelier rentre dans le cadre de la mise en œuvre de l’ordonnance de répartition prise par les juges de la Cour pénale internationale (CPI) pour réparer les préjudices causés aux victimes de la destruction des dix bâtiments protégés de Tombouctou en 2012 », explique UNESCO Mali.
Ils étaient plus de 70 bénéficiaires (25 maçons qualifiés, 20 apprentis maçons, 20 femmes maçons et autres acteurs de la chaine de valeur de la conservation et de la gestion des bâtiments protégés à Tombouctou), à prendre part à cette formation. « Cet atelier visait à assurer une meilleure appropriation de la notion de valeur réparatrice des mesures qui seront mises en œuvre en faveur des bâtiments protégés et à contribuer à leur dissémination au sein des communautés de Tombouctou », nous expliqueEdmond Moukala, Chef du bureau et représentant de l’UNESCO au Mali.
L’objectif principal de cet atelier, toujours selon l’UNESCO Mali, est d’accroitre les connaissances des participants sur le concept du patrimoine culturel bâti classé et des techniques de conservation et de gestion des paysages architecturaux en terre, en vue de renforcer la gestion des bâtiments protégés de Tombouctou.
Youssouf Koné